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Publication du Cahier d'Etudes n°44: The Role of Collateral Requirements in the Crisis: One Tool for two Objectives?
La politique de garantie financière adoptée par l’Eurosystème présente des implications pour les mécanismes de transmission de la politique monétaire et le fonctionnement des marchés de capitaux. De telles implications se sont clairement manifestées depuis la crise apparue en 2007. La liquidité s’évanouissant dans le marché interbancaire, plusieurs banques ont commencé à utiliser intensivement des financements de la part de la banque centrale, afin de couvrir leurs besoins de liquidité à court terme. En conséquence, les critères d'éligibilité des actifs nantis auprès de la banque centrale sont devenus encore plus critiques que le taux à court terme comme facteur de transmission de politique monétaire et comme élément déterminant de la liquidité dans le marché interbancaire.
Cette conclusion est basée sur une analyse rétrospective de certaines mesures de ‘soutien renforcé du crédit’ prises par la BCE durant ces deux dernières années. L’analyse s’appuie sur une schématisation du mécanisme de transmission monétaire où les banques peuvent choisir de se refinancer sur le marché interbancaire ou auprès de la banque centrale sous la contrainte de fournir des garanties appropriées. En soulignant les relations réciproques entre ces conditions de nantissement et d'autres outils et objectifs ciblés par la banque centrale, le résultat de cette étude est une reformulation de la problématique relative aux critères d'éligibilité 'optimaux' pour les actifs utilisables comme garantie dans les opérations de politique monétaire. En fin de compte, cette approche amène l’auteur à énoncer des recommandations en matière de politiques de collatéral et de taux d'intérêt, ainsi que de stratégie de sortie des mesures non-conventionnelles mises en place par l’Eurosystème durant la crise.
Ces recommandations peuvent être résumées en sept propositions.
1. Les critères d'éligibilité des actifs admis en garantie des opérations de crédit de la banque centrale sont au moins aussi importants que le taux à court terme pour définir le niveau d’aisance d'une politique monétaire.
2. Étant donné le rôle actuel de tels critères d'éligibilité pour la politique monétaire de l'Eurosystème, la politique de taux d'intérêt et la politique de garantie ne devraient pas être déterminées indépendamment l’une de l'autre; les deux devraient plutôt être menées conjointement en considérant la stabilité des prix et la stabilité financière.
3. Dans un cadre théorique néoclassique (c'est-à-dire, avec une courbe d’offre de monnaie/crédit plutôt ascendante sur le marché interbancaire), des critères d'éligibilité plus larges pourraient s’avérer nécessaires pour poursuivre une politique monétaire plus expansive: selon la dotation effective d'actifs à nantir par les banques, de tels critères d’éligibilité pourraient se révéler cruciaux pour un fonctionnement ‘lisse’ du mécanisme de transmission monétaire, dans la mesure où une configuration correcte de ces critères peut être une condition nécessaire pour l'efficacité de l’abaissement des taux directeurs.
4. Du point de vue de la politique monétaire, l’abandon des mesures temporaires d’élargissement des collatéraux éligibles en garantie des opérations de crédit des banques centrales devrait être subordonné à la réalisation (par rapport à la situation de fin 2008) d'au moins une des trois conditions ci-après:
i. Un rétablissement du marché monétaire sans garantie, en vertu d’une courbe d’offre de monnaie/crédit moins ascendante dans le secteur interbancaire;
ii. Un élargissement de la dotation d'actifs éligibles à nantir par les banques auprès de la banque centrale et/ou sur le marché interbancaire;
iii. Une hausse des taux directeurs (ainsi l’inversion des actions analogues prises par la BCE en octobre 2008) et/ou un élargissement du corridor constitué par les taux des facilités permanentes (pour stimuler l’offre de monnaie/crédit sur le marché interbancaire).
5. La détermination des critères d'éligibilité des actifs comme instrument dans un autre but que son objectif premier de gestion des risques pourrait être le moindre mal en temps de crise; cependant, à long terme (c'est-à-dire, dans des conditions ‘normales’, voire 'en temps d’accalmie') elle est douteuse sous plusieurs aspects: primo, un profil de risque trop élevé pour ces critères pourrait compromettre la cohérence de l'objectif de politique monétaire ainsi que l’indépendance de la banque centrale; secundo, une telle utilisation pourrait amener la banque centrale à agir au-delà de son mandat légal; tertio, cette même utilisation pourrait soulever une question d’aléa moral pour les banquiers, sans pour autant résoudre les problèmes structurels des banques.
6. Dans un schéma néoclassique de transmission monétaire qui intègre tant la stabilité des prix que la stabilité financière comme objectifs ultimes de la politique d’une banque centrale, l'attribution exclusive de l'instrument du taux d’intérêt à l'objectif de la stabilité des prix ne devrait pas constituer un dogme.
7. De manière générale, il est nécessaire d'adopter une approche intégrée dans la prise de décisions de la banque centrale du vingt et unième siècle, en abandonnant, le cas échéant, cette version de la règle de Tinbergen prescrivant l'attribution exclusive d'un instrument à un seul objectif de politique de la banque centrale.
Le cahier d’études peut être téléchargé sur le site internet de la BCL www.bcl.lu.