Film sur les missions et activités de la BCL
Publication du Cahier d’études n° 161 - Using household-level data to guide borrower-based macro-prudential policy
Auteurs: Gaston Giordana et Michael Ziegelmeyer
Cet article analyse les mesures macroprudentielles appliquées aux crédits immobiliers résidentiels au Luxembourg en utilisant des données anonymes au niveau des ménages individuels. Ainsi, il fournit une approche complémentaire aux études qui se basent sur les données au niveau des banques ou les données agrégées. Premièrement, nous calculons différents ratios d’endettement et mesurons la vulnérabilité financière des ménages individuels en utilisant les données de la plus récente vague de l’enquête luxembourgeoise sur le comportement financier et de consommation des ménages (collectée en 2018). Nous comparons ces résultats aux vagues précédentes, collectées en 2014 et 2010. Deuxièmement, nous simulons l’effet des différentes mesures macroprudentielles prévues par la loi du 4 décembre 2019, en calculant l’impact que différents paramétrages auraient pu avoir sur les ménages ayant un prêt hypothécaire récent en 2018, ainsi que le montant de crédit qui aurait dépassé les limites réglementaires. Troisièmement, nous évaluons la précision des instruments macroprudentiels pour cibler les ménages qui sont financièrement vulnérables (selon des critères typiques de la littérature). En fixant les limites macroprudentielles plus bas, davantage de ménages sont classés comme financièrement vulnérables, ce qui réduit le montant du crédit disponible. En fixant les limites plus haut, moins de ménages sont classés comme financièrement vulnérables, ce qui permet l’octroi de plus de crédit mais implique un risque systémique plus élevé avec des coûts potentiels à long terme. Les autorités ne peuvent pas éviter cet arbitrage entre différents types d’erreur (l’allocation de crédit à des ménages vulnérables ou la restriction de crédits à des ménages qui ne sont pas vulnérables). En utilisant différentes hypothèses quant aux préférences des autorités, nous appliquons une approche guidée par les données pour calculer le paramétrage « optimal », dans le sens qu’il minimise les erreurs de classification.
L’analyse met en exergue trois résultats principaux. Premièrement, entre 2014 et 2018 la valeur médiane du ratio prêt/valeur a augmenté au Luxembourg, comme aussi celle du ratio dette-sur-revenu disponible. Cependant, les différences ne sont pas statistiquement significatives et donc on ne peut pas affirmer que la charge de la dette des ménages s’est détériorée considérablement. En utilisant des définitions conventionnelles de la vulnérabilité financière, la part des ménages vulnérables n’a pas changé de manière significative.
Deuxièmement, pour le ratio prêt/valeur (loan-to-value ratio, LTV), la limite la moins restrictive qui est envisagée par la loi (100%) aurait affecté 24% des ménages qui ont emprunté entre 2015 et 2018 pour acheter leur résidence principale. Les ménages concernés auraient représenté 28% de la dette totale de ce groupe et auraient dû réduire leur dette de 7% pour se conformer à la limite. Par contre, la limite la plus restrictive qui est envisagée par la loi (75%) aurait affecté 64% des ménages avec des hypothèques récentes et 74% de la dette totale de ce groupe, exigeant une réduction de 18% de leur dette pour se conformer à la limite. La loi envisage des limites pour d’autres ratios qui peuvent être encore plus restrictives. Une limite de 400% pour le ratio de la dette hypothécaire au revenu disponible aurait affecté 76% des ménages avec des prêts hypothécaires récents et 87% de la dette de ce groupe, exigeant une réduction de 41,5% de la dette des ménages concernés.
Troisièmement, en simulant un scénario défavorable, nous montrons que la combinaison de plusieurs ratios est plus efficace pour identifier les ménages qui n’étaient pas financièrement vulnérables dans les conditions bénignes de 2018, mais qui deviendraient vulnérables après un choc sévère sur leur revenu. Cela suggère qu’une limite réglementaire sur le ratio prêt/valeur est plus un complément qu’un substitut des pratiques internes appliquées par les banques lors de la sélection des emprunteurs.
Le contenu de cette étude ne doit pas être perçu comme étant représentatif des opinions de la Banque centrale du Luxembourg ou de l’Eurosystème. Les opinions exprimées reflètent celles des auteurs et non pas nécessairement la position de la Banque centrale, de ses dirigeants ou de l’Eurosystème.
Ce cahier d’études est disponible sur le site internet de la BCL : www.bcl.lu